Ayten Mutlu
le monde actuel, fondé de plus en plus sur l’immédiateté de l’action, ne laisse malheureusement pas beaucoup de place à la poésie qui, si encore présente dans les rares manifestations culturelles du pays, ne s'y retrouve en fait que pour satisfaire le plus souvent un désir mondain de faire "intello dans le vent".
Depuis un moment déja je tenais à vous présenter une poésie encore méconnue chez nous.
Une poésie portée par la voix chaude et le regard "cru" d'Ayten Mutlu, poétesse Turque, que l'écrivain Turque et aussi mon ami,Mustapha balel, m'a fait découvrir pour mon plus grand plaisir....je vous laisse en juger...
PARTIR
(ayten Mutlu)
-1-
l’homme peut comprendre un jour
qu’il est un arbre qui se vieillit tout seul
et peut écrire la tristesse donc
aux blessures causées par le vent dans son corps
à ta grande surprise en automne
tu apprends
ne pas croire aux couleurs des feuilles
est cet horrible mensonge du temps,
cet horrible mensonge de la passion,
de l’ambition,
des moments, des souvenirs,
de ceux que tu as vécu ou non
à une course aveugle comme un fleuve furibond
aux montagnes, aux chambres, aux consolations
dans les diminutions que tu crois augmenter
aux étoiles qui dévorent la lumière du cœur
aux cris sans échos sur le dernier rire
d’une feuille tombée
tu apprends en demeurant interdit
l’immense mystère du temps et de la vie
-II-
le ciel ne raconte l’infinité qu’à la pluie
or une fois atteinte à la terre la goutte oublie
que la pluie est un pays triste
comme s’il n’existe qu’un seul automne : oublier
et un mensonge plus vrai que la vie
que raconte-t-il à la terre le bruit de la pluie
une chanson, une poésie, une histoire d’automne
si tu étais un vieil arbre, un arbre tout nu
qu’est-ce que tu raconterais au vent
qui souffle sans cesse dans ton cœur ?
«laisse-moi tranquille, en moi
il n’existe plus aucun printemps
à part de l’automne »
c’est de partir peut-être, l’amour, partir simplement
enroulant une tristesse oisive à tes blessures
laissant doucement tes racines dans la terre
comme un arbre renversé par le vent
Traduit par : Mustafa BALEL
L’AMPHORE
(Ayten Mutlu)
tu as demandé le nom du temps
un cadavre d’océan gît dans ta voix
le temps et moi,
nous nous ressemblons tant que, ai-je dit
nous transportons des pierres froides sans cesse
à un fleuve qui traîne la vie
commence, ai-je dit à mes yeux
d’une voix d’un voyageur qui a oublié son nom,
commence, à l’alphabet de cet ancien voyage-là
car il faut un voyageur pour chaque récit
il y aurait quelqu’un qui lit aussi les larmes
dans le coeur brisé d’une amphore
Traduit par : Mustafa BALEL
Mustaphe Balel en dit:
Née à Bandirma (Turquie), en1952 ; diplômé de la Faculté de Management de l’Université d’Istanbul (1975), elle commence des études d’ingénieur en construction avant de les abandonner en troisième année. Tres jeune, elle a commencé à publier des poésies et des récits courts, d’abord dans les journaux locaux, ensuite dans les revues littéraires les plus prestigieuses du pays : Varlık, Hürriyet Gösteri etc. Des extraits de ses recueils ont été publiés dans les pays européens (France, Suède, Allemagne, Espagne, Russie etc.) dans les anthologies, ou des revues littéraires.
Dans la poésie d’ Ayten Mutlu, Lauréate de Prix Ibrahim Yildizoglu (1999) et prix de poésie de la Rencontre International des Poétes de Yalova (2001), maîtresse en poésie condensée en image, il se dégage une atmosphère lyrique qui reflète une lutte en soi-même, ainsi qu’il se dévoile un monde où l’horreur et la beauté s’entremellent presque de façon harmonieuse.
Ses recueils de poésies :
« Dayan Ey Sevdam » (Résiste, Mon Amour), 1984
« Vaktolur » (Ce Jour Viendra), 1986
« Seni Özledim » (Tu me manques), 1990
« Kül İzi » (Trace de Cendre), 1993
« Denize Doğru » (Vers la Mer) 1994
« Çocuk ve Akşam » (l’Enfant et le Soir), 1999
« Taş Ayna » (Miroir en Pierre), 2002
kb...pour que vive le beau
9 commentaires:
À 4:33 AM , Anonyme a dit...
Bonjour Khalid,
On ne peut rester insensible à ces poèsies oh combien émouvantes
À 5:31 AM , Anonyme a dit...
Bonjour KB,
Merci de nous faire découvrir une telle poèsie. Tant d'émotions et de vérités se dégagent de ces deux poèmes où se cotoient deux mondes. L'homme est à l'image de cet arbre qui avec ses blessures connaît aussi l'automne.
Lynn
Ps:je reviens plus tard
À 2:36 PM , Anonyme a dit...
Cher ami
"...l'immédiateté du moment..."? Tu ne croyais pas si bien dire. Au moment même où j'étais en train de me connecter sur ton blog, ma secretaire me rappela à l'ordre : Hind F. vous a appelé plusieurs fois, et elle vous demande de la rappeler. Hind F, n'est ni ma fille, ni, hélas, ma copine. C'est ma banquière qui s'inquiete pour ma trésorerie en voyant mon compte rougir comme une tomate m'ramdna. Deux minutes après, c'est mon comptable qui se pointe avec un tas de trucs que je signe sans même regarder. Et il y a 5 minutes, c'est douce mais, néanmoins si exigeante moitié qui téléphone pour me rappeler de ramener la chebakia,les dattes, le pain panini et le jben, et surtout que je ne devais pas oublier d'acheter le ( super) cadeau pour sa nièce qui doit accoucher d'une minute à l'autre... et la poésie dans tout ça ? Franchement, kb, est ce que c'est le moment de poétiser ?
ML...pouet-pouet
À 4:00 PM , Anonyme a dit...
Je ne suis pas vieux
Ayoub..
À 4:30 PM , Anonyme a dit...
سلام
تركيا البعيدة
والقريبة جدا
الجمال يجب أن يدوم
شكرا
À 8:48 PM , Anonyme a dit...
Pour que vive le beau comme tu dis, Kb, c'est pour cette raison que je relis ton meilleur cru :
j'ai vu naitre le monde
dans le regard d'un enfant
sous un ciel étoilé
en petites larmes de joie
j'ai vu naitre la mer
dans les yeux du soleil
qui caressait les vagues
de ses cils dorés
j'ai vu naitre les hommes
dans des cris de douleurs
qui me font toujours peur
comme la vie enjôlée
mais je n'ai jamais vu Dieu
je ne pourrai le faire
qu'une fois dans les cieux
quand je n'aurai plus d'yeux
Choukran Jazilin...
À 11:15 PM , Loula la nomade a dit...
KB,
Ce poème m'a fait penser à Yasar Kemal (qui ressemblait à mon pater) cela m'a fait penser à Mehmet le mince. Merci.
PS. Question pur question:-) What is it with the adds?
À 6:24 AM , Anonyme a dit...
wow Khalid, je viens de découvrir ces poèmes !
je découvre....
À 9:03 PM , Anonyme a dit...
Cher KB,
Tu es en train d'avoir un nouvel adepte:amateur de belle prose,j'apprends petit à petit à apprécier la poésie.Auparavant,je pensais qu'un certain artificialisme enrobait forcément tout poème...Je me rends compte que tes morceaux choisis transportent un goût et une odeur,et qu'un petit effort permet de les déguster et d'en inhaler les bonnes émanations.
Artiste s'avère l'homme,créateur d'histoire et de beau,éternel angoissé qui plane ,plane pour oublier.
Fadi,new student.
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